Lycee Romain Rolland

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jeudi 21 janvier 2010

Haïti, et après ?

                                                              

En dépit de la forte réplique du 20 janvier, la catastrophe d’Haïti est en voie d’être surmontée. Cependant elle a fait surgir une multitude de questions. Il paraît essentiel d’anticiper sur les réponses que l’on peut leur apporter.

              Mercredi, à 6 heures AM, heure locale, une réplique de magnitude 6,1 a été ressentie dans la zone  dévastée par le séisme du 13 janvier. Les plaques de la zone des Caraïbes présentent une des configurations les plus dangereuses du monde avec celles de l’Asie et de la Californie. Deux zones d’accrétion parallèles compriment de petites plaques continentales, ce  qui engendre dans toute la zone des failles cisaillantes.
             Concernant Haïti  deux de ces failles traversent le pays d’ouest en est ; or, d’après les sismologues, celle qui est incriminée dans l’événement actuel n’a cédé que sur un tiers de sa longueur ; tout laisse  présager que les deux tiers restants éclateront dans les années ou les décennies à venir.
Il n’est donc pas superflu de s’interroger, qu’il s’agisse d’Haïti ou d’une autre région du monde, sur la prévention et le traitement des crises futures, en particulier en analysant les dysfonctionnements actuels.


  Les   défis de la logistique
   

 On peut considérer que le lundi 11 janvier, soit 5 jours après le drame, avec 280 centres d’accueil fonctionnels dans la zone sinistrée, les moyens mis en oeuvre pour secourir les victimes étaient enfin parvenus au niveau requis. Or, il était frappant de remarquer, quelques heures seulement après la catastrophe, le nombre considérable de sinistrés qui souhaitaient rejoindre leur famille hors de la zone sismique mais n’étaient pas en mesure de le faire, faute de moyens de transports. Toute cette population valide était assurée de trouver de la nourriture et des soins hors de cette zone. Par conséquent Il aurait  été pertinent non seulement de garantir son évacuation (approvisionnement  en essence et doublage des lignes de bus par des véhicules  militaires)  mais d’en faire une priorité. En effet, dans cette éventualité, les moyens  matériels  auraient été  plus rapidement suffisants pour apporter  une aide efficace à la  population restante, en particulier sur le plan de l’approvisionnement en eau.
Pendant plusieurs jours, alors que les blessés s’entassaient à l’hôpital de Port-au-Prince sans recevoir aucun soin, faute de personnel médical, les ONG spécialisées peinaient à implanter leurs hôpitaux de campagne.
Deux avions cargos de MSF ont ainsi dû être déroutés sur Saint-Domingue pour cause d’encombrement de l’aéroport. Un planning des arrivées par voie aérienne (eau /essence/véhicules/personnel et matériel médical) devrait permettre à l’avenir d’éviter ces retards préjudiciables. Enfin il est hautement souhaitable que ces hôpitaux volants s’installent à proximité des hôpitaux existants ; c’est là que les blessés légers iront naturellement chercher des soins mais c’est là aussi que l’information sur les blessés graves parviendra.
   
 La sélectivité de l’assistance internationale

                Les équipes d’interventions déléguées par les Américains, Français, et autres intervenants ont paru systématiquement donner la priorité à leurs nationaux en négligeant les Haïtiens, singulièrement les plus pauvres d’entre eux. Leurs premiers efforts ont porté invariablement sur la recherche des survivants dans les débris des hôtels de luxe et des bâtiments officiels.
               C’est ainsi qu’à l’hôtel Montana des « miraculés » secourus 17 heures  après le séisme - ce qui doit être un record en la matière - font le récit de leur sauvetage et de la longue attente qui l’a précédé. L’un d’eux, Nicolas Mazellier, plus lucide, «  demeure frappé par le contraste entre le traitement privilégié auquel il a eu droit - une fois rescapé, il a rapidement reçu des soins de grande qualité - et l'indifférence dans laquelle se sont retrouvés les sinistrés haïtiens » (Journal de Montréal, 20 janvier 2010). La préfecture de Martinique, questionnée le 21 janvier sur le pourcentage d’ Haïciens parmi les blessés transportés sur l’île, refuse de répondre ; d’après l’un des soignants, ils ne représenteraient que 10% des évacués. De fait, une semaine après le séisme , aucune instance ne paraît avoir pris en main le problème des ensevelis des bidonvilles. Des hélicoptères les survolent mais on ne tente pas d’intervention, sous prétexte que l’atterrissage n’est pas faisable.
               Comment ont donc lieu les sauvetages en mer ? Ne sait-on pas larguer du matériel ou déposer du personnel à partir d’un hélicoptère ?
               D’un autre côté les nations secourables comprendraient mal qu’on ne cherche pas prioritairement à secourir des compatriotes.
                A l’avenir Il faudrait donc systématiquement conférer à l’ONU la direction des opérations et n’envoyer sur site que des régiments internationaux.
  
 Une mobilisation sans précédent

                Cependant tout n’est pas désespérant.
                Les aides financières se multiplient depuis le séisme et atteignent actuellement un  total de près de 1 milliard 200 000  dollars ; les plus gros donateurs sont  les Etats-Unis et la Banque mondiale . Aucune catastrophe n’a réuni autant d’aides au niveau international ; toutes les nations se sentent concernées et proposent des aides. Celles-ci  peuvent être symboliques ou étonnantes ; ainsi la Bolivie se signale-t-elle par un don de 500 litres de sang. Plusieurs ONG ont recueilli des subsides dédiés à Haïti. Enfin de grandes institutions telles que le Programme alimentaire mondial ou la Fédération internationale de la Croix-Rouge  sont en train de monter des programmes spécifiques.
               Mais si l’aide internationale  s’est constituée pour secourir Haïti, la question primordiale est désormais de déterminer comment l’argent va être utilisé, comment cette aide massive va être gérée.
On sait le rôle qu’a joué le « ciment haïtien » dans la majoration des dommages ; on sait moins l’étendue de la corruption dans ce malheureux pays.
               Si l’on n’y prend garde, tous ces subsides iront dans la poche des plus malins et des plus immoraux et ne seront d’aucun bénéfice pour le plus grand nombre.
               Par ailleurs le triumvirat hâtivement constitué par les Etats-Unis avec le Canada et le Brésil n’est probablement pas exempt d’arrières pensées et, si on le laisse aller, débouchera immanquablement sur le clientélisme.
               Là encore c’est à l’ONU de prendre en main la gestion de la reconstruction.

Indispensable prévention : l’exemple japonais

               Parmi les séismes les plus violents enregistrés dans le monde, un sur cinq se produit au Japon. Ce pays possède le système d’alerte aux séismes le plus performant du monde et il est capital qu’Haïti profite de cette expérience.
               En particulier un dispositif de capteurs placés dans l’ océan et sur la terre ferme est capable de réagir aux prémices des mouvements telluriques.
               Mais, bien que ce système permette en théorie de détecter un séisme quelques secondes avant qu'il ne se produise et par conséquent de déclancher une alerte,  il ne sera d’aucun profit sans infrastructures fiables.
               Voila pourquoi  la politique de prévention repose d’abord sur la construction parasismique. En plaçant une surface fluide entre les fondations et le corps du bâtiment, on permet à celui-ci, en cas de secousse brutale, une sorte de contre mouvement qui  laisse l’infrastructure « debout ».
                En supposant ce double principe acquis, il reste à enseigner à la population comment réagir adéquatement à un tremblement de terre.
                Là encore la politique japonaise est exemplaire : consignes précises (ouverture des portes, fermeture du gaz, abri dans les impostes, etc...), simulations de catastrophes en milieu scolaire et en milieu urbain, entraînement individuel dans des pièces d’habitation montée sur vérins hydrauliques et transportées en semi-remorques.

Tous ces principes, c’est maintenant qu’il faut les mettre en oeuvre. Il y a un temps pour la déploration et un temps pour l’action. On a entendu sangloter un médecin qui avait tout fait pour sauver une petite fille et puis la petite fille était morte. les soins étaient arrivés trop tard et le matériel manquait. On ne peut pas faire que des catastrophes n’aient pas lieu. Mais on peut faire que plus d’enfants soient sauvés à l’avenir.

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